Oumou Sangaré : Je m'engage pour l'Afrique qui souffre

Oumou Sangaré rend visite à des familles en difficulté de Bamako
Oumou Sangaré et de enfants de Bamako /photo magali bergès
Pourquoi avoir créé la Fondation Oumou Sangaré ?
Oumou : Depuis longtemps, je partage ce que je gagne avec ceux qui en ont besoin. J’ai été élevée comme ça : quand j’étais enfant, nous n’avions pas grand-chose ; et pourtant si quelqu’un venait nous rendre visite ou si une voisine se trouvait démunie, ma mère partageait le peu de nourriture présent dans la marmite ! Parfois, elle-même ne mangeait pas…
Dès que j’ai pu rapporter un peu de sous à la maison, j’ai appris à partager à mon tour. Je devais avoir 5 ou 6 ans… quand on a partagé alors qu’on avait peu, on continue quand on gagne mieux sa vie.
Beaucoup de gens sont beaucoup plus riches que moi (même s’ils sont moins célèbres) et pourtant ils parviennent à rester sourds à la misère qui nous entoure. Je me demande comment ils font !
Franchement, en Afrique on voit des personnes dans des situations tellement difficiles qu’il faut avoir un cœur de pierre pour rester insensible.
Malheureusement, au cours de mes voyages, je vois de plus en plus des êtres humains dans des conditions de vie indignes et ceci sur tous les continents. Si nous n’agissons pas maintenant, une partie de l’humanité va vivre comme des animaux tandis qu’une autre partie de la population va continuer à s’enrichir.
Mon rôle en tant qu’artiste est d’attirer l’attention sur cette situation scandaleuse. Et de me battre de toutes mes forces pour plus de justice.
 
Mais vous disiez que l’action de charité fait partie de votre éducation, de la vie familiale depuis votre enfance. Pourquoi avoir créé votre Fondation aujourd’hui ?
 
Oumou : C’est un chemin logique. En 2001, je me suis lancée dans les affaires en ouvrant un hôtel restaurant, la « Residence Wassulu », situé sur la route de l’aéroport car les artistes n’ont pas de retraite assurée et que le succès peut s’arrêter du jour au lendemain. Là, j’ai pris goût à créer une entreprise.
Puis j’ai créé la marque de véhicules Oum Sang afin d’accompagner le développement de mon pays, le Mali. A travers cette marque de véhicules, j’ai développé une société de taxis pour permettre à des jeunes sans emploi de trouver un travail tout en donnant à Bamako une compagnie de taxis propres et sûrs.
En Europe, on appelle cela « l’entreprenariat social ». Grâce à toutes ces expériences dans les affaires, j’ai appris à organiser les choses pour être plus efficace.
La Fondation est arrivée naturellement : ces dons que je faisais auparavant de façon désordonnée, vont maintenant être structurés. Une équipe va gérer cette fondation, nous allons lever d’autres fonds pour construire des projets plus importants….
Et puis je n’oublie pas que je suis la fille d’un imam, et qu’aider la sœur ou le frère qui n’a rien fait partie de l’Islam. Et que chacun d’entre nous doit s’améliorer au cours de sa vie, alors j’essaie de faire les choses de mieux en mieux.
 
 
Quelles sont les priorités de la Fondation Oumou Sangaré ?
 
Oumou : Pour le lancement de la Fondation, nous avons organisé un grand concert au Stade Modibo Keita pour recueillir des fonds pour les enfants malades du Noma. C’est une affection qui ronge les chairs tendres de la face, en commençant par les lèvres (on appelle les malades défigurés « les enfants sans visage »). C’est un fléau causé par le manque d’hygiène ; c’est donc une maladie profondément liée à la pauvreté et au manque de soins, qui touche les enfants. C’est pourquoi, de manière emblématique, nous avons mis l’accent sur cette calamité. Il y a plusieurs associations à Bamako qui font un travail extraordinaire auprès des victimes du Noma. Je savais que le lancement de ma Fondation aurait un certain retentissement et les aiderait à sensibiliser l’opinion publique.
Mais dans mes chansons, je défends la femme africaine depuis plus de vingt ans. Alors notre priorité demeure l’aide aux femmes et aux enfants d’Afrique.